Haffner Energy et LanzaJet vont produire du carburant d’aviation durable à Vatry

Le projet « Paris Vatry SAF » a pour but de produire chaque année 30 000 tonnes de carburant pour l’aviation à partir de biomasse. L’entreprise marnaise souhaite ainsi contribuer à répondre à l’enjeu de décarbonation du mode aérien.

Ayant son siège à Vitry-le-François, dans la Marne, c’est tout naturellement vers l’aéroport voisin de Vatry que Haffner Energy s’est tourné pour la production de carburant d’aviation durable (ou SAF, pour Sustainable Aviation Fuel). Créée en 2015, Haffner Energy est spécialisée dans la production d’énergie renouvelable avec un procédé de thermolyse de résidus de biomasse. La société est héritière de l’entreprise familiale Soten (« Société technique d’énergies nouvelles »), qui œuvrait dans la cogénération sur les centrales thermiques avant de se tourner au début des années 2000 vers la biomasse.

Pour le projet « Paris Vatry SAF », Haffner Energy s’est associé à l’entreprise américaine LanzaJet, créée en 2020 dans le but spécifique de produire du carburant d’aviation durable. Ce SAF recourt au procédé « Alcohol to Jet » (ATJ), développé par LanzaJet.

« Notre collaboration avec LanzaJet pour le projet Paris-Vatry SAF permet aux deux sociétés d’apporter des avantages décisifs à la production de SAF », déclare Philippe Haffner, le PDG de la société marnaise, qui précise : « l’ATJ est l’un des deux procédés les plus avancés pour la production de SAF approuvés par l’organisme international de normalisation ASTM. Afin de se conformer à la réglementation de l’Union européenne sur les SAF, la biomasse doit provenir de matières premières avancées. »

Cela signifie que la biomasse utilisée ne doit pas provenir d’une production agricole spécifiquement développée pour produire du carburant. Le procédé de Haffner Energy permet de recourir à tout type de biomasse, notamment résiduelle. L’expertise de LanzaJet intervient ensuite, pour convertir en éthanol le gaz de synthèse obtenu à partir de la biomasse, puis pour convertir cet éthanol en carburant utilisable par les avions.

Dans un premier temps, le projet Paris-Vatry SAF permettra de produire chaque année 30 000 tonnes de carburant d’aviation durable. Une capacité de production qui pourra être doublée si l’activité rencontre le succès, voire triplée pour livrer chaque année près de 100 000 tonnes de SAF.

Un aéroport qui attire des implantations malgré des trafics modestes et fluctuants

La zone d’activité de 400 hectares, contiguë à l’aéroport de Vatry et située essentiellement sur la commune de Bussy-Lettrée, accueille aujourd’hui une vingtaine d’entreprises, appartenant principalement au secteur de la logistique. On peut notamment citer : GXO Logistics (pour la grande distribution), C-Log (logistique textile), Veolog, Mosolf (logistique automobile), Ceva Logistics ou encore Geodis.

En 2021, Vatry a été labellisé par l’État « site industriel clés en main », ce qui doit permettre d’accélérer les implantations dans un objectif de réindustrialisation. Un projet d’extension, qui vise à doubler la surface de la zone d’activité, pourrait voir le jour en 2026.

Ancien aéroport militaire, Vatry fut ensuite exploité par la CCI avant d’être repris par le Conseil départemental de la Marne. La Région Grand Est, qui soutient financièrement son exploitation déficitaire, a confié en février dernier à la Chambre régionale des comptes une « évaluation de la politique de soutien aux plateformes aéroportuaires du Grand Est », dont celui de Vatry. Son rapport, qui doit se pencher sur le passé et aussi évaluer les perspectives de l’aéroport de la Marne jusqu’en 2030, doit être rendu début 2025.

Force est de constater, en effet, que depuis sa mise en service en l’an 2000, celui-ci ne semble pas avoir trouvé de modèle de développement pérenne. Son éloignement des grandes agglomérations et, en particulier, de la région parisienne semble jouer en sa défaveur et le rendre moins attractif pour les logisticiens mondiaux (de type Fedex ou DHL) qui continuent à privilégier les plateformes aéroportuaires des métropoles (comme Roissy – Charles de Gaulle), plus proches des bassins d’emplois et de consommation, en dépit des problématiques de nuisances sonores et de congestion. Ces deux derniers points constituent, en revanche, des points forts de la plateforme marnaise.

De fait, ses trafics varient fortement d’une année sur l’autre, étant donné qu’ils reposent essentiellement sur des vols non réguliers (« charters ») répondant à des besoins spécifiques. Les capacités disponibles de l’aéroport de Vatry ont notamment pu être mis à profit pendant la pandémie du covid-19 pour l’acheminement de masques et de matériel sanitaire ainsi que l’entreposage des avions de ligne n’ayant plus de passagers à transporter.

15e place au classement des aéroports nationaux de fret

Ainsi, la plateforme a connu un pic de trafic en 2021 avec près de 30 000 tonnes de fret avionné cette année-là, du jamais vu depuis 2008. En 2023, selon les statistiques publiées par l’Union des aéroports français, Vatry se plaçait à la 15e place des aéroports nationaux pour le fret, avec 336 vols et 9 005 tonnes transportées. Cela représente un volume de marchandises trois fois supérieur à celui enregistré en 2019. Mais c’est aussi trois fois moins qu’en 2021 et 50 % de moins qu’en 2022, années où le fret à Vatry avait cumulé respectivement 822 et 557 vols.

Vatry est, parmi les principaux aéroports français, celui dont l’activité fret est la plus fluctuante. Les chiffres sont plus stables en ce qui concerne les passagers. L’aéroport de la Marne a ainsi vu passer 67 195 passagers en 2023, soit 8 % de plus qu’en 2022 mais 17 % de moins qu’en 2019.

 

Photo : © ORT&L Grand Est